La Fabrique Balades Sonores, disquaire parisien hyperactif et défricheur

A l’approche du Disquaire Day, nous avons eu envie de vous faire (re)découvrir un de nos chouchous : La Fabrique Balades Sonores, disquaire et boutique de jolies choses installés à Paris. Confessions autour d’un café avec Toma et Chicamancha et playlist éclectique de leurs coups de cœur du moment !


Il faut un sacré culot et un peu de douce folie pour ouvrir un magasin de disques à l’heure du streaming et du mp3. Pourtant, ce n’est pas une mais deux boutiques (la première en 2012 et la seconde en 2015) que Balades Sonores a ouvert aux numéros 1 et 3 de l’avenue Trudaine dans le 9e arrondissement à Paris. Mais La Fabrique Balades Sonores n’est pas un disquaire comme les autres. A l’intérieur, se côtoient une collection toujours plus envahissante de disques, vinyles, DVD et cassettes mais également des livres sur la musique ainsi que des vêtements et des accessoires créés par les doigts de fée de l’artiste Chicamanca. Hyperactifs de la scène musicale parisienne, Toma, Chicamancha et leur équipe ont également créé un label, organisent des concerts, des showcases, des événements et expositions dans leurs boutiques, collent des affiches aux quatre coins de Paris, distribuent des flyers dans tous les concerts et festival parisiens et de l’Hexagone… Rencontre avec un duo de passionnés.

Comment décririez-vous l’identité musicale des Balades Sonores ?

Si initialement La Fabrique Balades Sonores est plus axée sur la musique indé, pop et rock, nous proposons maintenant aussi de la musique électronique, des musiques de films, des musiques du monde, du jazz, de la soul, du funk, de la disco et du hip-hop. Les nouvelles générations ont moins l’esprit de chapelle qu’à notre époque, et ça se remarque en magasin. Les paniers des clients soulignent un éclectisme très assumé.

Vous avez commencé avec une boutique, puis deux… Vous allez bientôt investir toute la rue ?

Ce n’est pas dans nos projets immédiats ! L’opportunité que nous avons eu d’acquérir le local mitoyen à notre boutique a été une aubaine. Nous avons assez vite manqué de place dans la première boutique. Bénéficier des deux espaces côte à côte est idéal mais il nous faut maintenant asseoir cette nouvelle dynamique. Qui dit deux boutiques dit deux fois plus de charges, de loyer, de personnel et de travail.

Comment communiquent vos deux univers : le côté disquaire et les créations graphiques et textiles de Chicamancha ?

La cohabitation de nos deux mondes se fait de manière très naturelle, nous n’avons jamais caressé le projet opportuniste de créer un concept store. L’union entre Balades Sonores et Chicamancha est d’abord une histoire d’amour. Chicamancha est une vraie touche-à-tout, donc la polyvalence ne se limite pas à ce qu’elle fait avec Balades Sonores. Depuis quelques temps, elle s’occupe également de produire des vidéos en stop-motion pour annoncer le Disquaire Day ou les soldes par exemple. Et puis, notre activité est complémentaire sur les festivals où Chicamancha propose ses créations. Il est bien utile de pouvoir acquérir un « tote bag » signé Chicamancha pour y mettre les disques qu’on vient d’acheter ! Nous recevons régulièrement des propositions de collaboration de la part de graphistes séduits par notre concept, mais nous sommes obligés de les refuser, puisqu’à ce niveau-là nous sommes déjà comblés !

Photos : DR et Thomas Terrien

Qu’en est-il du Bittersweet(paradise), le festival que vous organisez chaque année en juillet ?

Le festival est un peu à notre image : convivial, éclectique et accessible. Les événements y sont gratuits ou à prix libre. En accord avec notre attrait pour l’itinérance, ils prennent place dans un lieu différent chaque jour. Nous privilégions surtout les salles de concerts et les espaces extérieurs, comme le square d’Anvers, situé en face de nos boutiques, la terrasse de Petit Bain, la plage de Glazart ou des lieux atypiques et éphémères comme Ground Control l’été dernier. Depuis la première édition du Bittersweet(paradise) en juillet 2010, le festival a changé de forme tous les ans : sa durée et le nombre de groupes qui y jouent ne sont pas figés. Tout dépend de notre envie, du budget et du temps qu’on a, des groupes avec lesquels on a travaillé pendant l’année et des opportunités qui se présentent à nous. Puisque les deux magasins se révèlent être très chronophages, le festival de cette année sera sûrement à l’image de celui de l’année dernière, sur quatre ou cinq jours avec une trentaine de groupes à l’affiche.

Comment décririez-vous la scène musicale actuelle ?

Le constat est plutôt positif ! Grâce au web, on assiste à un vrai mélange de styles et à un abattement des frontières tant au niveau du public que des musiciens. Des groupes comme These New Puritans, Animal Collective ou encore des scènes musicales entières comme celle de Porto pour les musiques électroniques brassant traditions angolaises (Kuduro), favorisent un vrai brassage des styles et cultures. Depuis des années, ce sont aussi beaucoup de disques oubliés qui ressortent : des musiques du monde au folk obscur, on célèbre autant en ligne que dans les bacs une grande diversité. C’est un puits sans fond et c’est très excitant de ne cesser de découvrir des sons.
En France, les frontières bougent aussi. Il faut noter par exemple le retour à la langue française. Il y a dix ans, il était mal vu de chanter en français et maintenant c’est l’inverse.

Comment votre travail influence la scène parisienne et française ?

Je ne pense pas que nous influencions quoi que ce soit, nous faisons juste partie de cette scène éclectique et riche. Mais nous avons soutenu à leurs débuts plusieurs groupes qui jouissent maintenant d’une certaine notoriété. Parmi eux, Aline, La Féline, Mina Tindle, Exsonvaldes et plus récemment Ropoporose ou Gontard!. Avec cinq showcases par mois en quatre ans, ce sont plus de 250 groupes qui sont venus jouer à La Fabrique Balades Sonores. Sans compter tous les concerts organisés hors les murs et dans le cadre de notre festival. L’idée reste de soutenir les nouveaux talents et de refléter l’activisme de nombreuses scènes et styles musicaux. Côté Le Label Balades Sonores, avoir aidé différents labels à sortir en vinyle trois projets si différents l’atteste : du garage noise de Tropical Horses à la pop érudite en français de La Féline en passant par « Chansons de Russie » récoltées par Vincent Moon.

Quel est le concert que vous avez préféré ?

Nous avons été très marqués par les concerts de Son Of (projet né des cendres de Jack The Ripper). C’est un groupe humainement complexe et incertain, ce qui fait qu’à part nous presque personne n’a réussi voire osé les faire jouer. Le concert de Deerhoof au Nouveau Casino en 2010 pour le BitterSweet(paradise) occupe également une place spéciale dans nos mémoires. En plus d’être étranger, ce groupe est le plus connu qu’on ait fait jouer, et c’est un de nos chouchous personnels.

Quels sont vos projets pour la suite ?

A court terme, réussir notre nouvelle édition du Disquaire Day, qui a lieu pendant le week-end du 16 avril. A moyen terme, organiser notre festival d’été. Et à long terme, pérenniser notre projet dans son ensemble tout en gardant cette soif pour toujours plus de musiques !

Ecoutez la playlist que La Fabrique Balades Sonores a concocté spécialement pour Indie Guides :

Découvrez notre sélection d’adresses culturelles et alternatives à Paris avec notre city guide Indie Guides Paris.