L’orchestre allemand Dresdner Sinfoniker organise un concert à la frontière américano-mexicaine le 3 juin contre le projet de Donald Trump de construire un mur tout le long de la frontière. Ces musiciens invitent d’autres artistes à les rejoindre pour donner un fort écho à cet événement de protestation.
Les murs aux frontières n’ont jamais été aussi nombreux. En additionnant les murs actuels et en projet, on atteint le chiffre de 41 000 km, soit l’équivalent du tour de la Terre ! Pire : la moitié des murs actuels ont été construits après 2010… L’accession à la présidence américaine de Donald Trump et son projet de mur tout le long des 3 200 km de la frontière américano-mexicaine mettent encore davantage en lumière cette fermeture des frontières.
Presque trente ans jour pour jour après que le président américain Ronald Reagan a lancé à son homologue russe Mikhaïl Gorbatchev “Tear Down This Wall” (littéralement “Abattez ce mur”) en 1987, l’orchestre symphonique de Dresde donnera un concert le 3 juin 2017 à la frontière américano-mexicaine pour protester contre ce projet.
Ce faisant, les musiciens allemands n’entendent pas uniquement protester contre la projet de mur de Donald Trump mais également contre toutes les politiques nationalistes et de repli sur soi autour du monde. Ils souhaitent démontrer que la musique ne connaît pas de frontière et que l’art peut contribuer à construire des ponts et à faire tomber toutes les barrières. Entretien avec Markus Rindt, le directeur de l’orchestre Dresdner Sinfoniker, à l’origine du projet.
Pourquoi avoir décidé de lancer le projet “Tear Down This Wall” ?
Nous avions une tournée de programmée au Mexique. Et, pendant que nous étions en train de l’organiser, Donald Trump a été élu à la présidence de la République aux Etats-Unis. Cela a attiré notre attention sur son projet de construire un mur à la frontière alors on s’est dit : “Pourquoi ne pas rassembler des musiciens et aller protester contre l’idéologie de Trump à la frontière ?” Et les choses se sont faites comme ça…
En tant que musicien allemand, est-ce que la construction de ce mur résonne plus particulièrement avec votre histoire personnelle ?
J’ai grandi en Allemagne de l’Est entouré de murs… J’ai même fui l’Allemagne de l’Est peu avant la chute du mur. Je suis fortement opposé à l’idée de séparer les gens et de limiter leur liberté de mouvement. Je m’oppose également fortement à l’isolation européenne actuelle : toutes les semaines, des personnes meurent en essayant de rejoindre l’Europe. Je trouve ça insupportable.
Est-ce la première fois que le Dresdner Sinfoniker s’engage sur un sujet politique ?
Non, je dirais même qu’on est plutôt un orchestre très politique. Nous avons toujours été ouverts aux autres pays, cultures et traditions musicales afin de mieux comprendre les autres. Depuis des années, les projets du Dresdner Sinfoniker ont combiné musique et problématiques socio-politiques. En 2013, nous avons tourné en Cisjordanie et en Israël. Et, en 2016, nous avons eu un retentissement international avec notre concert germano-turc-arménien “aghet – ağıt”, un projet en commémoration du génocide arménien.
Vous avez financé ce projet grâce à une campagne Kickstarter. Est-ce que cette campagne vous a également permis de faire connaître le projet, notamment auprès de personnes intéressées pour y contribuer ?
Nous avons reçu le support de personnes provenant de plus de 40 pays ! La campagne a très largement aidé à faire connaître le projet partout dans le monde. Nous avons même reçu des dons provenant de Côte d’Ivoire, du Kenya ou de Taïwan. Et de nombreuses personnes nous ayant soutenues nous ont proposé leur aide.
Quels sont les événements prévus pour “Tear Down This Wall” ?
Nous avions prévu de jouer des deux côtés de la frontière mais les autorités américaines ont refusé. Mais les autorités mexicaines nous ont beaucoup appuyées jusqu’à présent. Tout comme la ville de Tijuana. Le concert au Parque del Mar à Tijuana enverra un message fort contre les murs. L’un des événements phares sera l’improvisation dirigée “The Big, The Bug, The Cricket & The Quack” d’Harald Thiemann, pour lequel le Dresdner Sinfoniker, avec l’aide de percussionnistes américains et mexicains, va transformer le mur en instrument.
Combien d’artistes et de public attendez-vous le 3 juin ?
Nous attendons 80 artistes et un public d’environ 1000 personnes. Mais l’événement ne concerne pas que nous. Nous invitons tous les artistes, musiciens et personnes ouvertes d’esprit à s’impliquer ce jour-là et à organiser leurs propres performances et flash mob le long de la frontière. Le refus des autorités concerne uniquement le concert du Dresdner Sinfoniker au Friendship Park à San Diego. Tout le monde est invité à participer et à partager les vidéos de leurs propres initiatives et projets avec le hashtag #teardownthiswall.
En savoir plus sur le projet « Tear Down This Wall » : http://dresdner-sinfoniker.de/teardownthiswall/
Photo de couverture : Jonathan McIntosh
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