Voyage dans le temps au cœur de la scène musicale underground belge

L’application Belgium Underground retrace l’activité de la scène musicale alternative belge depuis 1976 jusqu’à nos jours. Rock, electro, post-punk, lo-fi : grâce à elle, ses créateurs David Mennessier et Benoit Deuxant mettent en lumière quarante ans d’autoproduction, de DIY et du meilleur de la création alternative et underground belge.


De la Belgique, nous connaissons mieux les bières que la musique. Mais il ne faut pas se fier à la taille du pays pour mesurer sa scène musicale, et celle de la Belgique est aussi fournie que diverse. David Mennessier et Benoit Deuxant le prouvent avec leur application Belgium Underground et sa sélection subjective mais néanmoins représentative de la scène musicale alternative belge de ces quarante dernières années. Musiciens, producteurs, organisateurs de concerts et de soirées, fondateurs de label, graphistes et disquaires y sont présentés. Près de 3000 acteurs de la scène musicale underground belge sont ainsi localisés sur une carte interactive mettant en relief les relations existant entre eux. Six dominantes musicales émergent de cette sélection pour faciliter notre approche de cette scène musicale. En voici un aperçu.

Punk

1976. Londres est en peine effervescence, la Belgique également. Une nouvelle vague de musiciens souhaite tourner la page du rock progressif, représenté par des groupes comme Yes, ELP ou Genesis et s’emparent des scènes des petits clubs. Les premiers punks se retrouvent le dimanche après-midi dans la discothèque Gémeaux, boulevard du Souverain à Bruxelles, ensuite renommée le Canotier. De nombreux artistes, comme Simple Minds ou le DJ Auguste (Gust De Coster, futur co-fondateur de la radio libre FM Bruxel en 1980), se produisent sur sa scène.

Wave

Années 80. Alors que le rock commence tout juste à devenir grand public, de nombreux musiciens de l’époque s’orientent vers la scène underground. En Belgique, beaucoup de groupes nés de l’héritage punk sont menés à définir eux-mêmes les codes de leur activité. Création de labels, naissance du mail-art avec échange de cassettes par voie postale, conception de fanzines et fondation de précaires micro-salles de concerts : les artistes post-punk animent la scène musicale alternative belge.

Arty

Années 80 toujours. En Belgique comme dans le reste de l’Europe, les labels indépendants se multiplient. Ceux-ci boudent les étiquettes et se livrent à des expérimentations, mêlant des styles auparavant cloisonnés et associant des pratiques artistiques d’horizons différents. Avec ce mouvement, les réseaux alternatifs de diffusion et de production de musique et d’organisation de concerts et d’événements adoptent de nouveaux modes de fonctionnement. C’est dans ce contexte que le Plan K, une salle de spectacle d’un genre nouveau, mêlant performances théâtrales, projections, happenings littéraires et événements musicaux, voit le jour à Bruxelles dans le quartier de Molenbeek.

New Beat

1986. Née de la scène alternative, la New Beat connaît une progression fulgurante. Ce genre naît un peu par hasard, lorsque le DJ Dikke Ronny décide de ralentir la vitesse d’un morceau de New Wave qu’il passe dans une discothèque courue du centre historique de Bruxelles, l’Ancienne Belgique. Les basses profondes et l’ambiance lancinante et hypnotique du morceau plongent les fêtards dans un état de transe léthargique. L’immense discothèque Boccaccio à Destelbergen devient le lieu incontournable des amateurs de New Beat après son ouverture en 1986. La New Beat connaîtra le succès jusqu’à la fin de l’année 1988, où les sorties médiocres et la baisse des ventes de disques signent la fin de la période phare du mouvement…

Guitares

Dans la première moitié des années 90, alors que la New Beat et ses dérivés battent de l’aile, le rock belge connaît une plus grande visibilité internationale grâce au succès de dEUS. Avec son triptyque guitare/basse/batterie, le groupe anversois séduit grâce à sa touche de liberté formelle héritée du jazz et un réel soin apporté aux mélodies…

Micro-labels

A partir du milieu des années 90, certains musiciens trouvent dans les micro-labels une alternative politique, esthétique ou économique à la chaîne de production et de diffusion dominante de l’industrie musicale. Vers 1993-1995, les enregistreurs 4 pistes et les graveurs de CD deviennent beaucoup plus accessibles et permettent aux artistes d’enregistrer des morceaux depuis chez eux. Le son produit est évidemment plus approximatif, mais cela ne dérange pas les musiciens lo-fi, qui en apprécient l’aspect authentique. Dans les années 1995-2000, ces musiciens se retrouvent sur les labels Toothpick, Studio Muscle, LéBo disques, Ubik, etc. Puis, à la fin des années 90, l’accès à des ordinateurs personnels associés à des logiciels d’enregistrement et de traitement de son permettent aux musiciens d’enregistrer et de se faire diffuser par un micro-label directement auprès du public. Le tout pour la même somme qu’ils auraient auparavant investi dans l’enregistrement d’une démo pour décrocher un hypothétique contrat auprès d’une maison de disques. Depuis les années 2000, alors qu’Internet freine la vente des disques, les micro-labels prennent souvent le parti d’adopter une identité forte pour le format ou l’esthétique de leurs sorties. Ainsi, Lexi Disques ne sort que des 45 tours, Okraïna confie toutes ses pochettes à Gwénola Carrère, et Dennis Tyfus se charge de l’illustration de toutes les pochettes de son label Ultra Eczema

Pour découvrir davantage la scène belge, téléchargez l’application Belgium Underground.

Disponible sur Appstore et Google Play

Photo : Rob Oo