Quel est l’un des points communs entre les scènes artistiques de Londres et Lisbonne ? Village Underground. Ce centre culturel, mêlant événements alternatifs et espaces de coworking, s’est d’abord installé à Londres avant de s’implanter également à Lisbonne. Vision croisée de ces deux capitales, qui ont une manière bien différente d’aborder le monde de la culture…
Village Underground London est né en 2007 en réaction au prix trop élevé des loyers des studios d’artistes dans la capitale. Installé dans un très bel ancien entrepôt en briques rouges, le lieu accueille sur son toit de vieux wagons de métro et des conteneurs maritimes servant d’espaces de coworking. Mariana Duarte Silva, qui y travaillait, a eu envie de créer une initiative similaire dans sa ville natale, Lisbonne. C’est ainsi que Village Underground Lisboa est né en 2014. A l’image de son aîné, ce lieu dispose de studios de coworking logés dans d’anciens conteneurs mais aussi d’un espace en plein air orné d’œuvres de street-art hébergeant des événements artistiques et sportifs et d’une cafétéria installée dans un ancien bus scolaire. Mariana Duarte Silva et Amelie Snyers de Village Underground London nous parlent de la scène artistique de leur ville respective, faisant ainsi ressortir leurs différences.
Londres l’assagie et Lisbonne l’audacieuse
“Culturellement parlant, Londres a au moins cinquante années d’avance sur Lisbonne”, estime Mariana Duarte Silva, qui a eu l’occasion de s’immerger dans la culture des deux villes. Londres dispose en effet d’une scène foisonnante, avec de quoi satisfaire tous les goûts, quel que soit le jour de la semaine. Mais les événements sont pour la plupart payants et l’offre est tellement pléthorique que le public ne peut souvent pas assister à toutes les manifestations qui l’intéressent. “La ville offre une programmation artistique très variée, mais manque d’événements gratuits comme le festival Walthamstow Garden Party pour rendre la culture accessible à tous”, regrette Amelie Snyers.
Si la scène culturelle de Lisbonne n’est pas aussi bien établie que celle de Londres, elle compense sa jeunesse par une fraîcheur et un dynamisme que l’on retrouve peu dans les rues londoniennes. En témoignent les établissements culturels audacieux qui s’y sont installés ces dernières années, à l’image de Casa Independente, Damas bar, Centro de inovação da Mouraria, EKA palace ou Largo Residências. Si ce constat est particulièrement vrai pour Lisbonne, d’autres villes au nord du Portugal, comme Braga, Barcelos et Porto, jouissent également d’une scène artistique en plein renouveau.
Loyers en hausse et fermetures de clubs à Londres
La hausse des loyers et le non-renouvellement des baux de clubs – pour permettre la construction de bureaux – ont participé à changer le paysage culturel de Londres. The London Astoria et London Astoria 2, The Marquee, Cable, Hammersmith Palais ou The Turnmills, tous des lieux de concerts incontournables à Londres, ont ainsi dû mettre la clé sous la porte. L’importance de ce phénomène a d’ailleurs poussé la Music Venue Trust à lancer un projet pour protéger les salles iconiques de la capitale. A Lisbonne, si les loyers restent bien entendu moins élevés qu’à Londres, les artistes locaux peinent à y vivre de leur art, à l’exception de ceux qui parviennent à se faire connaître en dehors des frontières du pays.
Hackney attire les artistes
La ville de Londres est bien consciente que la fermeture d’établissements culturels et la désertion de la capitale par les artistes pourraient lui faire perdre son statut de ville artistique majeure. Le bureau du maire travaille à s’assurer que Londres conserve son pouvoir d’attraction pour les artistes, mais sans réel résultat concret pour l’instant. “Hackney, où Village Underground London est installé, est un quartier reconnu pour sa diversité, son ouverture d’esprit et son progressisme, ce qui en fait un endroit parfait pour les artistes,” explique Amelie Snyer, “mais le budget alloué aux autorités locales a été réduit et elles doivent donc trouver de nouvelles sources de financement. Elles octroient ainsi des permis de construction à de grands groupes ou augmentent les loyers des organisations culturelles. Tout cela peut avoir un gros impact sur la communauté artistique d’un quartier.”
Bientôt un nouveau Village Underground ?
A Lisbonne, la municipalité cherche plutôt à encourager et à soutenir les établissements culturels qui voient le jour dans la ville. C’est dans cet esprit qu’elle a créé StartUp Lisboa en 2011 pour venir en aide aux jeunes entreprises durant leurs premières années d’activité. “Lorsque j’étais encore en train de chercher un lieu où installer un Village Underground à Lisbonne, la municipalité m’a contactée pour me demander de quelle manière elle pouvait m’aider. Elle m’a vraiment encouragée dans ce projet”, se rappelle Mariana Duarte Silva.
En parlant de projets… après Londres et Lisbonne, d’autres villes pourraient elles aussi bénéficier du dynamisme culturel du Village Underground. Il se murmure qu’une implantation serait envisagée à Barcelone… A suivre !
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Photos : DR, Carla Cuomo (repas), Zoë Klinck (soirée) & Heiko Prigge (Concert sur le toit)